En ces temps décadents ou les films de supers héros pullulent
comme des fourmis autour d’un steak bien saignant pour satisfaire la
nouvelle classe sociale juste entre le Hipster et l’Otaku, j’ai nommé le
Social Geek (celui qui se fringue chez Uniqlo sans avoir lu un seul One
Piece ou qui se dit Hardcore Gamer mais n’achète que les Call of Duty),
je ne pouvais, donc, faire l’impasse sur un film très bon mais hélas
pas assez reconnu (puisqu’il est encore en dessous de Voyage au Centre
de la Terre 2 en terme d’entrée, et ça, bah ça donne envie de se tirer
une balle après avoir shooté tous ces ados pré-pubères et décérébrés qui se
tripotent devant Immortels ou Machete, par ce que franchement « c’est
trop classe ») . Je parle bien entendu du Génialissime et très épuré Chronicle !
Alors, Chronicle, c’est d’abord le premier long métrage de Josh
Trank, jeune réalisateur de 26ans qui, après son court métrage en found
footage (« documenteur » en français) sur l’univers de Star Wars et
quelques épisodes de la série Kill Point, c’est vu confié par la Fox la
mise en scène du projet Chronicle et surtout un budget assez fantastique
pour la réalisation de ce film aux allures de Blockbuster.
Le Concept est simple : trois ados typiques du teenage movie
américain, un jeune un peu en marge et introverti, la star du lycée (aux
US, c’est celui qui est président du comité des élèves AHAHAH) et le
jeune un peu romantique et passionné de philo, autant dire trois
personnalités que ne sont pas vraiment les plus conciliables du monde à
première vue…
Mais c’était sans compté sur une substance étrange (non pas ce à quoi
vous pensez) qui va leur offrir, dans des circonstances peu
développées, des dons de télékinésie (pour ceux qui n’ont jamais joué à
Pokemon, c’est l’art surnaturel de modifier les règles physiques de son
environnement et de soi-même par la seule pensée, en gros on lévite, et
on fait léviter).
Et à l’inverse de la grande majorité des supers, nos trois compères
prennent alors une lourde décision… celle de ne faire absolument rien de
responsable et de n’utiliser leurs pouvoirs que de façon individualiste
pour se fendre la poire entre deux joins (bon peut-être pas mais on en
est pas loin) : ce qui est, à mon humble avis, la façon dont la plupart
des gens agirait.
Sauf que s’amuser à faire peur aux fillettes avec des ours en peluche
volants, c’est bien, mais ça ne dure que jusqu’à ce que les trois
lycéens se rendent compte qu’ils sont capable de faire bien plus (ou
bien pire) ce qui va leur poser des problèmes éthiques…
Voilà pour l’histoire.
Ensuite en terme d’ambiance, on se pose carrément plus haut, puisque
donc, sous couvert d’une sorte de chronique intimiste filmée à la
première personne, on va, tout en rajoutant des caméras (caméras qui
auront toujours une certaine réalité puisqu’elles existent dans le film)
et des angles de vus, petit à petit dériver vers le désenchantement,
l’incompréhension, la peur, la haine pour arriver enfin au symbole
monstrueux de l’excroissance d’une société qui renie ses codes et son
histoire tout comme le cinéma renie aujourd’hui les mythes qui l’ont
fondé.
Et c’est donc dans une gradation menée avec subtilité, qui nous
rappelle Misfits tout en allant bien plus loin dans la conscience
sociétale, et peut être même Elephant, dans ce que la forme enferme les
personnages en un parcours cyclique qui les étouffe, Chronicle est bien
plus qu’un film de Super Héros, c’est un nouvel Akira, une histoire sur
la réalité d’une jeunesse, qui n’existe aujourd’hui que trop souvent à
travers l’image numérique, qui se sent puissante et en même temps
bridée, qui perd ses repères et s’accroche à ce qu’elle peut voir comme
une alternative à un monde qui les oppresse.
Bref, assez d’épanchement… pour vivre cette expérience, il vous
suffit de vous sortir les doigts des fesses, d’éteindre le 20h de TF1,
de cracher sur les affiches de La Colère des Titans devant lesquelles
vous passerez, et de payer ce qu’on vous demandera car c’est largement
mérité !
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