Oubliez tout ce que vous pensez de Claude François, oubliez
tout ce que vous croyez savoir sur les biopics français (film
biographique*) et même oubliez tout ce que vous savez du cinéma
français… Et puis vous savez quoi, oubliez ce que vous imaginez savoir
sur le cinéma tout court ! Mais vous vous demandez sans doute quelle
révolution cinématographique du paysage français suis-je en train de
décrire avec cette grandiloquence qui me caractérise si bien (merci
merci). Et bien je parle bien sûr, non pas de Polisse, The Artist ou
Intouchable qui, il faut le reconnaître, ne méritent pas d’être jetés
dans un volcan, mais qui sont tout de même loin, très très loin du
fantasmagorique Cloclo dont je vais vous faire la chronique.
Bon. Tout d’abord, oui, taper sur le cinoche français, c’est un peu
facile. Ça n’enlève en rien le renoncement cinématographique auquel on
est confronté aujourd’hui dans les grandes salles (des films comme la
vérité si je mens en sont de très bons exemples.).
En effet, c’est un constat accablant que l’on peut aujourd’hui dresser de notre 9ème
art national puisque les bousasses à la sauce Clavier/Reno y sont même
parfois plus défendables que les
pseudo-branlettes-intellectuelles-pour-étudiant-en-histoire-des-art-qui-mange-bio,
censées incarner le summum de la réflexion philosophico-artistique du
genre cinématographique…
Alors sous cette couche d’auteurisme prétentieux et crasse, de
bien-pensance ultra commerciale, se dresse un espoir, une lueur dans la
brume…
ET IL ÉTAIT TEMPS !
Cloclo est donc un film qui annonce une scission (inégale mais nette)
dans les casseroles du cinéma de notre douce patrie : à commencer par
faire la différence entre les réalisateurs qui savent tenir une caméra
(Kassovitz et J.Audiard pour ne pas les citer et, oui, j’emmerde les
collabos néo-fascistes qui ne comprennent juste pas ce qu’est le Cinéma,
le vrai, le sincère… Fuck le Figaro) et les manches à couille très
nombreux et très fier de leurs discours flatteurs, de leur verbiage
stupide dont la célébration médiatique (re-Fuck le Figaro) nous donne
clairement envie de se la prendre et de se la mordre très fort.
Qu’on se le dise, qu’on l’écrive et qu’on le lise donc, Cloclo de
Florent Emilio Siri est un pur chef d’œuvre et je vais tenter en trop
peu de lignes de vous expliquer pourquoi :
Bon déjà Claude François, tu t’en fous ? Moi aussi ! Enfin disons que
j’en suis pas au point de m’inscrire à la nuit des sosies… Et pourtant
et pourtant, je vais gentiment te demander de fermer ta gueule et de
mater le nom du réal : FLORENT EMILIO SIRI.
Quand Eastwood te réalise J.Edgar ou que Cronenberg te fais Dangerous
Methode, tu dis pas, je m’en fous d'Edgar et Freud, non moi j’aime
bien les pirates, je veux des pirates. Tu la fermes et tu fonces le voir.
Et bien avec Siri c’est un peu le même principe. Pour ceux qui ne le
connaissent pas, il est le réalisateur de l'inégal mais prometteur Ennemie Intime, de Nid de
Guêpes et Hostage qui sont tous les trois plus bouleversants et
brillants les uns que les autres, et ce de par leur nature symbolique inégalée en France
puisque Siri a su, dans ces derniers, digérer un mix d’influences et de
codes sans jamais tomber dans l’analyse lourdingue (ça c’est mon boulot) et toujours en étant puissamment évocateur. Et ça, c’est ultra-bandant !
Cloclo n’échappe donc pas à ces exceptions du Cinéma, comme l’Ordre
et la Moral ou Un Prophète qui s’imposent à coup de Machine Gun comme un
bon gros coup de boule dans nos préjugés les plus tenaces.
Siri fait preuve ici de la maîtrise experte d’un Scorcese pour filmer
le parcours d’une icône en devenir, sans jamais tomber dans la
facilité, puisqu’il dynamite notre inconscient collectif pour mieux nous
évoquer de lourdes remises en cause produites elles-même par
l’évidence de son montage. Tout simplement sublime. (Ceci est une phrase
à relire deux ou trois fois).
Ainsi donc, pour certain plans (notamment ceux des bains de foules de Claude François) on vu la scène presque derrière l'épaule de ce dernier, tandis que pour d'autres, la caméra nous fait prendre du recule et conscience que notre héros de la scène précédente est en fait un type complètement paumé qui ne sait pas s'y prendre pour se faire aimer. Mais l'analyse de ce film n'est pas, à mon sens, très pertinente car ce n'est pas la volonté de Siri que l'on dissèque sa mise en scène (en pourtant, certains plan séquences sont réellement géniaux, notamment celui de la poursuite en voiture).
Non content de nous livrer l’une des meilleures réalisations
française actuelle, Florent Emilio a su s’emparer d’un mythe fondateur
de plusieurs générations françaises pour y traduire de la façon la plus
sincère qui soit ses propres obsessions (besoin d’être aimé sans savoir
s’y prendre, perte du père)…
Avec un scénario, transcendé par la mise en scène qui joue sur notre
fascination/répulsion du personnage, qui balaye avec des partis pris
surprenants, la vie de Claude François en questionnant un mythe et son
art, en évoquant par le cadre et non par le verbiage (on se souvient du
décevant L’Histoire d’un Mec sur Coluche), Siri, nous dépeint ici, et
toujours en s’adressant complètement à nos sens et à nos émotions, les
travers et les joies de l'une des figure iconique franco-française du XXème siècle.
Oubliez donc la vanité et l’ego que nous servent la plupart du temps
les tacherons du cinéma français moralisateur, et plongez dans cette
aventure immersive et monumentale qu’est Cloclo car il est la promesse
(pour les optimistes) ou l’espoir (pour les réalistes) d’un cinéma
sincère et viscéral qui s’adresse à notre cœur et à nos tripes plus qu'à notre intellect franchouillard.
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